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Lettre ouverte pour la Journée mondiale pour la santé des femmes et la santé menstruelle

Madame la Ministre responsable de la Condition féminine,

Nous vous demandons de faire de la lutte contre la précarité menstruelle une priorité, car il est inacceptable que quiconque au Québec puisse manquer de produits menstruels.

Favorisant l’égalité, la dignité et la santé des femmes et de toutes les personnes menstruées, l’équité menstruelle doit être considérée comme un droit et bénéficier en priorité aux populations les plus vulnérables, par exemple les membres de la communauté étudiante, les responsables de famille monoparentale, les personnes autochtones, immigrées ou incarcérées, les personnes avec un handicap ou en situation d’itinérance, ou encore celles vivant en régions rurales et éloignées.

De la puberté à la ménopause, soit pendant 38 ans environ, les femmes cisgenres et d’autres personnes menstruées, telles que certains hommes trans, personnes non binaires ou intersexes, ne peuvent se soustraire à la gestion du flux menstruel et y consacrent, en moyenne, 6000 $. Une somme conséquente qu’une personne sur trois au Canada peine à assumer et que les personnes non menstruées peuvent utiliser pour l’achat d’autres produits répondant aux besoins essentiels ou investir dans leur éducation ou leurs loisirs.

L’augmentation du coût de la vie accentue la précarité menstruelle. Les personnes menstruées – et surtout les femmes étant à la croisée des oppressions, plus nombreuses à être en situation de pauvreté – doivent faire des choix entre des dépenses élémentaires.

Pourtant, imaginez que tous nos enfants, petits-enfants, mères, sœurs et ami·es soient libéré·es de cette charge financière et puissent vivre un cycle menstruel dépourvu d’inquiétude, de stigmatisation, de honte et d’exclusion.

Projetez-vous vers un avenir où les apprenant·es auraient accès gratuitement, sur leurs lieux d’enseignement, à des produits menstruels exempts de substances nocives, à un accompagnement bienveillant vers la connaissance et l’autonomisation de leur rapport à leur corps et leur santé, et, surtout, n’auraient jamais à sacrifier leur éducation ou leurs activités par manque de produits menstruels et de soutien.

Imaginez encore que ces produits soient disponibles gratuitement sur tous les lieux de travail. Fini le papier de toilette enroulé dans la culotte, ou le tampon que l’on porte bien plus longtemps que recommandé, faute d’un autre à portée de main ou de bourse. Fini la charge mentale de la logistique autour de l’arrivée inopinée des menstruations. Après tout, il ne viendrait à l’idée de personne de se balader avec son propre rouleau de papier de toilette, n’est-ce pas?

Imaginez enfin que l’on trouve ces produits sans avoir à les demander dans les lieux de passage fréquentés par les personnes en situation d’itinérance, dans les édifices publics tels que les hôpitaux, prisons, bibliothèques, centres de loisirs, centres communautaires, piscines, etc., ou encore que leur accès soit facilité pour les personnes qui ne peuvent pas se déplacer.

Ces dispositifs existent déjà dans de nombreux pays et provinces canadiennes, mais c’est l’Écosse qui est devenue la première, et, à ce jour, l’unique nation à légiférer pour rendre l’accès aux produits menstruels universel. Imaginez le Québec s’en inspirer et faire à son tour figure de modèle pour tous les pays francophones!

Les initiatives existantes nous prouvent que ces politiques tiennent leurs promesses : les personnes qui en ont les moyens continuent d’acheter leurs produits menstruels, tout comme elles continuent d’acheter du papier de toilette, l’aide servant avant tout aux personnes vulnérables.

Madame la Ministre, pour la Journée internationale de la santé menstruelle, nous vous appelons à mettre les menstruations au cœur du débat public. Les normaliser et créer un environnement favorable à leur vécu est une condition fondamentale à la réussite de ce changement systémique majeur et nécessaire au sein de la société québécoise : la fin de la précarité menstruelle.

Virginie Mikaelian, Fédération des femmes du Québec
Claire Murati, Regroupement des groupes de femmes de la Capitale-Nationale
Marie-Andrée Gauthier, Réseau des Tables régionales de groupes de femmes du Québec
Lydya Assayag, Réseau québécois d’action pour la santé des femmes

Et 210 organisations féministes, communautaires, étudiantes, syndicales et entreprises signataires

 

Pour télécharger la lettre ouverte, cliquez ICI.

Lettre ouverte du RGF-CN en réaction à l’annonce de l’arrêt Roe v. Wade au États-Unis

L’avortement est un droit et doit le rester!

La menace au droit à l’avortement qui plane aux États-Unis ces jours-ci ne nous surprend pas, pourtant elle doit vivement et collectivement nous alarmer. Si la Cour suprême américaine venait à invalider l’arrêt « Roe versus Wade » en juin prochain, texte qui constitue le fondement du droit à l’avortement américain, il s’agirait d’un retour en arrière de 50 ans ! Chaque État pourra alors choisir sa propre législation et ce sont 26 États conservateurs qui sont prêts à interdire complétement l’avortement.

Les groupes de femmes, particulièrement les groupes libre choix de partout dans le monde, ne sont pas surpris, travaillant d’arrache-pied depuis des décennies à contrer l’influence des groupes anti-choix et de la droite conservatrice.

Elle ne nous surprend pas mais nous affecte grandement, car la précarité face au droit et à l’accès à l’avortement existe ici aussi. Tous les jours, les groupes anti-choix raffinent leurs stratégies de lobbying et leur fonctionnement pour accroître leur influence. Plus de trente ans après la décriminalisation de l’avortement, cette question a refait surface lors de la dernière campagne électorale fédérale. En mai 2021, le parti conservateur canadien présentait un projet de loi visant à limiter l’accès à l’avortement, son 7e depuis 2007.

Au Québec, on peut penser à la campagne « Ta raison c’est la bonne https://www.taraison.ca/ », première campagne d’information au droit à l’avortement au Québec ; aux nombreuses actions organisées en réponse au mouvement anti-choix ; à l’accompagnement quotidien des femmes, des personnes trans et non-binaires dans un choix libre et éclairé concernant leur santé sexuelle et reproductive.

Pourtant, l’avortement fait partie de la vie de tous et toutes. Au Québec, 1 femme sur 3 aura recours à l’avortement au cours de sa vie. Et au Canada, 1 naissance sur 4 est due à un échec de contraception ! Personne n’est à l’abri d’une grossesse imprévue, mais toutes devraient avoir le choix de la poursuivre ou non.

Tout recul dans le droit à l’avortement constitue non seulement une atteinte aux droits fondamentaux des femmes, des personnes trans et non-binaires, mais également une menace à la santé publique. Rappelons que malgré les lois interdisant les interruptions de grossesse, les avortements continuent. Selon l’Organisation mondiale de la santé, 300 000 femmes meurent chaque année de complications liées à la grossesse et à l’accouchement, notamment en raison d’avortements pratiqués dans de mauvaises conditions de sécurité.

Une question de droit… et d’accès !

Bien que l’avortement soit légal au Canada, il faut rappeler que sa légalité ne constitue pas de facto un accès réel. Plusieurs obstacles limitent le droit à l’avortement au Canada : les inégalités d’accès selon le lieu de résidence, les délais d’attente, les lois restrictives de certaines provinces, l’objection de conscience du personnel médical, le statut migratoire ou la difficulté d’accès à la pilule abortive. Par exemple, dans la grande région de la Capitale-Nationale, il existe une seule clinique pour desservir toute la population, limitant l’accès des femmes vivant à distance de la ville de Québec et pouvant augmenter les délais d’attente.

Le droit des femmes de contrôler leur corps et leur maternité est fondamental. Aucun recul à cet égard ne peut être toléré, ici ou ailleurs. Tout doit être mis en œuvre pour améliorer les services actuels et faciliter l’accès à l’avortement libre, sécuritaire et gratuit pour toutes les personnes qui doivent y avoir recours, incluant celles qui ne sont pas couvertes par l’assurance-maladie publique, et ce, en respectant le choix de la méthode.

L’avortement est un droit et doit le rester. Nous ne pouvons pas risquer de prendre ce droit pour acquis.

Mélanie Leblanc et Élise Landriault-Dupont, co-coordonnatrices au Regroupement des groupes de femmes de la région de la Capitale-Nationale (RGF-CN)

Sylvie Pedneault, directrice générale de S.O.S Grossesse

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Revue de presse

Le Soleil

Le Journal de Québec

Presse-toi à gauche!

Entrevues générées par la publication de la lettre ouverte

Journal de Montréal

QUB radio avec Sophie Durocher – épisode du 5 mai à partir de 2 minutes 30 secondes

LCN en direct le matin – épisode du 5 mai

Le Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec signe cette lettre ouverte du Comité Accès Garderies

Le Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec joint sa voix aux 70 organisations qui demandent au gouvernement du Québec de redonner l’accès aux services de garde subventionnés aux familles demandeuses d’asile. Téléchargez la lettre du Comité Accès Garderies en cliquant ICI ou consultez leur communiqué en cliquant ICI.

 

Discrimination dans l’accès aux services de garde depuis 2018 : c’est assez !

Depuis maintenant près de quatre ans, les familles demandeuses d’asile au Québec n’ont plus droit aux services de garde subventionnés. Cette décision, basée sur une  réinterprétation discrétionnaire et non justifiée par le ministère de la Famille de l’article 3 du Règlement sur la contribution réduite, a des répercussions négatives sur un très grand nombre de familles. Les femmes demandeuses d’asile et leurs enfants en paient le prix fort. Sans accès à un service de garde abordable, les mères demandeuses d’asile, plus souvent monoparentales, et plus susceptibles de rester à la maison pour garder leurs enfants, se retrouvent isolées, privées de formation, d’emploi et de revenu. Cette restriction d’accès aux services de garde subventionnés et abordables freine aussi directement l’accès des enfants à des espaces éducatifs et socialisants indispensables.

« Je ne peux pas m’intégrer dans la société, et apprendre le français. Au lieu de cela, je vis de l’aide sociale allouée par le gouvernement en attendant ma date d’audience qui est encore indéterminée. (…) Cette situation a aussi un impact sur mon fils qui ne peut pas socialiser avec les enfants de son âge: il passe ses journées seul avec moi. Tous les autres enfants de son âge vont soit à la prématernelle, soit à la garderie. »
Blessing, mère monoparentale de cinq enfants. Arrivée du Nigéria, elle a dû refuser deux offres d’emploi faute d’accès à un service de garde abordable.

Le Comité Accès Garderies, formé en septembre 2018, a mené de nombreuses démarches auprès du gouvernement du Québec pour alerter sur ces impacts, dont la publication de lettres ouvertes et une pétition signée par plus de 13 000 personnes.

Le 18 février 2019, des représentant-e-s du comité ont finalement obtenu une rencontre avec le ministre de la Famille, Mathieu Lacombe. Deux demandeuses d’asile y ont participé avec leurs enfants afin de lui exposer les conséquences négatives de cette politique discriminatoire sur leur vie quotidienne et leurs conditions d’intégration. 

En mai 2019, face à l’inaction du gouvernement malgré ces nombreuses démarches, le comité a décidé de se tourner vers les tribunaux. Le travail pro bono d’avocat.es allié.es a permis de déposer une requête à la Cour supérieure afin de remettre en question la constitutionnalité du règlement restreignant l’accès aux services de garde subventionnées. Les 21 et 22 avril 2022, les avocat.e.s du cabinet Melançon Marceau Grenier Cohen, avec une intervention en soutien de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, contestent la constitutionnalité des actions du gouvernement dans ce dossier. Il est encore temps pour le gouvernement d’entendre raison et de respecter les droits et la dignité des familles demandeuses d’asile, avant le procès d’avril.

Le Projet de loi no1 concernant les services de garde éducatifs à l’enfance est encore à l’étude à l’Assemblée nationale. Des député.e.s de l’opposition ont déposé le 23 mars 2022 un amendement afin d’y inclure l’accès aux services de garde subventionnés pour tous les enfants, peu importe le statut d’immigration de leurs parents. Cet amendement, appuyé par Québec solidaire, le Parti libéral du Québec, et le Parti Québécois, a  été rejeté par la Coalition avenir Québec. C’était l’occasion pour le gouvernement d’enfin mettre fin à la discrimination dans l’accès aux services de garde et c’est une honte qu’ils aient refusés de le faire. 

Redonner accès aux garderies aux familles demandeuses d’asile et aux personnes à statut précaire, c’est changer leur vie. Si la pandémie a pu démontrer une chose, c’est que les services de gardes subventionnées sont un service essentiel pour toutes les familles. 

 

Le Comité Accès Garderies demande au gouvernement du Québec de s’engager à : 
1- Redonner l’accès aux services de garde éducatifs subventionnés et aux versements anticipés du crédit d’impôt pour frais de garde d’enfants aux demandeurs et demandeuses d’asile et autres personnes à statut précaire ;
2- Mettre en place un nombre suffisant de places en CPE qui soient accessibles à tous les enfants, peu importe le statut d’immigration de leurs parents. 

 

Cette lettre du Comité Accès Garderies, est co-signée par les organisations suivantes (en date du 31 mars) :

 

  1. Collectif Bienvenue
  2. Maison d’Haïti
  3. Clinique juridique Solutions Justes de la Mission communautaire de Montréal
  4. Centre de femmes l’Essentielle
  5. Foyer du Monde
  6. Table des groupes de femmes de Montréal
  7. Ligue des droits et libertés
  8. Solidarité sans frontières
  9. Centre Entre-Femmes
  10. L’R des centres de femmes du Québec
  11. ACCÉSSS
  12. Réseau des Tables régionales de groupes de femmes du Québec
  13. Association de l’OuÏe de l’Outaouais
  14. Réseau des femmes des Laurentides
  15. Mouvement Action-Chômage de Montréal
  16. Coalition d’aide à la diversité sexuelle de l’AT
  17. Réseau d’action pour l’égalité des femmes immigrées et racisées du Québec (RAFIQ)
  18. Service jésuite des réfugiés – Canada
  19. Collectif pour un Québec sans pauvreté
  20. Fédération autonome de l’enseignement (FAE)
  21. Table de concertation du mouvement des femmes de la Mauricie (TCMFM)
  22. COMSEP
  23. Fédération des maisons d’hébergement pour femmes
  24. Hoodstock
  25. RÉCIFS
  26. Organisation populaire des droits sociaux
  27. PLAIDD-BF
  28. Maison d’accueil des nouveaux arrivants-MANA
  29. Collectif Soignons la justice sociale
  30. Confédération des syndicats nationaux (CSN)
  31. Réseau québécois d’action pour la santé des femmes (RQASF)
  32. Table de concertation des groupes de femmes Bas-Saint-Laurent
  33. CALACS de l’Est du BSL
  34. Fédération de la santé et des services sociaux – CSN
  35. Comité d’action de Parc-Extension
  36. Centre de
  37. Femmes du Témiscamingue
  38. Centre de femmes de Shawinigan
  39. Alternative Naissance
  40. Conseil québécois des syndicats universitaires (CQSU-AFPC)
  41. Centre des Femmes du Témiscouata
  42. Comité de solidarité de Trois-Rivières
  43. Regroupement des groupes de femmes de la région de la Capitale-Nationale
  44. Comité BAILS Hochelaga-Maisonneuve
  45. Comité populaire Saint-Jean-Baptiste
  46. Le Pont
  47. Réseau québécois de l’action communautaire autonome (RQ-ACA)
  48. Service de référence en périnatalité pour les femmes immigrantes de Québec
  49. Maison d’hébergement l’Aquarelle
  50. Fédération des femmes du Québec
  51. Mouvement d’éducation populaire autonome de Lanaudière (MÉPAL)
  52. L’Écho des femmes de la Petite Patrie
  53. Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec (FAFMRQ)
  54. Amnistie internationale Canada francophoneCentre de femmes l’Érige
  55. Centre des femmes du Ô Pays
  56. Concertaction femmes Estrie
  57. Syndicat des professeures et professeurs enseignants de l’UQAM (SPPEUQAM)
  58. Oasis des enfants de Rosemont
  59. Y des femmes de Montréal
  60. Clinique pour la justice migrante
  61. Mouvement d’éducation populaire et d’action communautaire du Québec
  62. Conseil d’Intervention pour l’accès des femmes au travail (CIAFT)
  63. Action Réfugiés Montréal
  64. Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles
  65. Centre Femmes de la Mitis
  66. Table de concertation de Laval en condition féminine
  67. Centre social d’aide aux immigrants (CSAI)
  68. Pavillon Marguerite de Champlain
  69. Maison L’Aid’Elle
  70. Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI)

Lettre ouverte : Journée internationale pour la justice sociale

Lettre ouverte du Regroupement des groupes de femmes de la région de la Capitale-Nationale à l’occasion de la Journée internationale pour la justice sociale le 20 février 2022

40 ans de négligence… et on s’étonne de l’urgence?

L’heure est au bilan à l’occasion de la Journée internationale pour la Justice sociale qui aura lieu dimanche. Force est de constater que l’écart entre les riches et les personnes appauvries se creuse et atteint des proportions indécentes. Les personnes racisées, les femmes et les personnes ayant des problèmes de santé physique ou mentale sont touchées de plein fouet. Le filet social ne parvient plus à toutes les retenir, ni à fournir les services de base nécessaires à l’ensemble de la population. Il est troué de partout. Il devient urgent de le réparer !

Depuis deux ans, de nombreux problèmes – qui ne datent pas d’hier! – sont devenus critiques, que ce soit le manque de places en garderie, la difficulté à se trouver un logement abordable, la pénurie de main d’œuvre, l’essoufflement du système de santé, le manque de ressources des groupes d’action communautaires ou encore celui du milieu scolaire. La crise de la COVID-19 n’est que le révélateur d’une problématique beaucoup plus grave: l’effritement volontaire des services publics depuis les 40 dernières années.

En effet, les gouvernements successifs des dernières décennies ont saboté le filet social. Ce même filet social, qui empêchait les personnes ayant des « embûches de vie » de sombrer dans la pauvreté (p.ex une mère qui devient cheffe de famille monoparentale après une séparation, une personne victime d’un accident qui ne peut plus travailler, etc.), n’a pas été comblé par les « richesses » créées, qui sont restées dans les poches des plus riches.

Les gouvernements ont diminué les impôts des plus riches et des entreprises, se privant ainsi de millions de dollars à investir dans les services publics. Ils ont coupé dans les services en santé et en éducation (éducation spécialisée, psychologie, orthophonie, physiothérapie, etc.) au nom de la dette et au profit du privé, sans jamais mettre en place des mesures concrètes pour colmater les fuites de capital dans les paradis fiscaux. Puis, le sabotage a continué avec l’investissement massif vers les métiers traditionnellement masculins (construction, ressources naturelles, etc) au détriment des métiers traditionnellement féminins (infirmière, enseignante, éducatrice, etc.). En dévalorisant ces métiers de soin, cela a sans aucun doute contribué à affaiblir le filet social. Aujourd’hui, la population ne peut accéder à des services sans passer par des interminables listes d’attente et alors que les taux d’inflation atteignent des sommets jamais égalés et semblent ne pas vouloir s’essouffler, plusieurs personnes se retrouvent pris à la gorge et passent dans les mailles du filet.

Les inégalités sociales et l’effritement des services publics, parapublics et communautaires ne sont pas des fatalités. Nous avons le pouvoir de nous mobiliser et d’exiger d’autres choix politiques, de prioriser le bien commun à l’accroissement des richesses de quelques-uns! À l’aube d’une crise environnementale qui aura de nombreuses conséquences sur nous tous-tes, c’est à nous de décider et de nous mobiliser pour la justice sociale.

Marie-Ève Fortier, RÉPAC 03-12

Judy Coulombe, Regroupement des groupes de femmes de la région de la Capitale-Nationale

Lettre ouverte au Premier ministre pour le droit des femmes à la santé

Monsieur Legault, le droit des femmes à la santé est en jeu

Linda Crevier, présidente du Réseau des Tables régionales de groupes de femmes du Québec (RTRGFQ)

La pandémie, et particulièrement Omicron, a poussé à son extrême un système de santé que l’on savait fragile depuis des années. Face à un réseau fissuré de toute part, un examen en profondeur s’impose. Force est de constater qu’il faudra rebâtir notre système différemment. Pour ce faire, les obstacles à l’accessibilité des services sociaux et de santé qui sont longtemps restés dans l’angle mort et qui touchent particulièrement les femmes devront être pris au sérieux par le gouvernement de François Legault.

Services centralisés, privatisés, tarifés, femmes larguées par la complexité du réseau et surtout confrontées aux violences commises par les institutions de la santé. L’ensemble des 17 Tables régionales de groupes de femmes et le Réseau des Tables régionales de groupes de femmes du Québec prennent aujourd’hui le crayon pour alerter le Premier ministre à ces entraves au droit à la santé. Le gouvernement doit s’y attaquer pour que toutes les femmes aient rapidement un réel accès à des services sociaux et de santé publics, gratuits, universels et de qualité sur l’ensemble du territoire.

Des souffrances alimentées par les institutions

Dans les 17 régions du Québec, les groupes de femmes nous rapportent des cas montrant que le réseau de la santé arrive difficilement à prendre en compte l’aspect multidimensionnel des femmes. Par exemple, au sein d’une ressource en santé mentale, une femme rapporte la violence vécue dans un contexte conjugal. Celle-ci se fait blâmer et répondre que son trouble de santé pourrait être la cause de cette violence. Elle est réduite à une seule chose : son état mental. Il en est de même pour une femme confrontée à la grossophobie au sein du réseau. Ses enjeux de santé sont le plus souvent réduits à son poids. Une autre femme voit sa situation médicale banalisée en raison d’un préjugé quant à la plus grande tolérance des femmes noires à la douleur. Cela entraîne des délais dans son diagnostic.

Ces attitudes bien réelles causent des souffrances physiques et psychologiques aux femmes qui les subissent et affectent leur accès à des soins de qualité. L’an dernier, la mort de Joyce Echaquan a mis un visage sur cette forme de violence pernicieuse commise dans ou par une institution. Cette violence institutionnelle met particulièrement en danger la santé et la vie des femmes autochtones, dont plusieurs vivent en situation de vulnérabilité sociale, et de nombreuses autres femmes vivant à la croisée des oppressions.

Les services inadaptés voire refusés à certaines femmes sont un autre exemple de cette violence qui engendre leur exclusion du système de santé et de services sociaux. Des femmes ne peuvent bénéficier de services, telle une mammographie, parce que les équipements ne sont pas adaptés à leur situation de handicap. D’autres se voient refuser l’accès à l’adoption ou à la reproduction assistée en raison de leur contexte de handicap. Par ailleurs, le virage numérique dans l’octroi de services ou la prise de rendez-vous crée une fracture d’accès pour les femmes aînées, celles avec un faible niveau de littératie ou encore celles habitant des territoires où la connexion internet est insuffisante.

Enfin, nous observons au sein du réseau une violence institutionnelle envers son personnel composé d’une majorité de femmes, et dans certaines régions de travailleuses sans-papiers, réfugiées, immigrantes et racisées, aux prises avec des conditions de travail intenables. Le sous-financement historique des services publics a engendré un réseau dont le fonctionnement repose sur la surcharge, la sous-rémunération, la non-reconnaissance voire l’exploitation de leur travail. Ces femmes en paient le prix par leur santé et leur appauvrissement.

Des gains historiques compromis

Ces enjeux vécus par les femmes se tournant vers le système de santé et par celles qui y travaillent s’inscrivent dans un continuum de violences genrées. Les gains pour le droit à la santé et pour l’égalité des femmes qui ont découlé de la mise en place du réseau public de la santé et des services sociaux sont sérieusement compromis.

Il y a un an, à la sortie du Plan d’action en santé et bien-être des femmes, le gouvernement Legault déclarait que leur santé est au cœur de ses préoccupations. Aujourd’hui, nous lui demandons s’il reconnaît les obstacles évoqués et s’il est prêt à agir dès maintenant de manière structurante pour les éliminer. Il est essentiel que le Québec ait des services sociaux et de santé véritablement accessibles aux femmes qui en sont le plus éloignées. Le droit à la santé est en jeu.

 

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Consultez la lettre ouverte dans La Presse ou téléchargez là en cliquant ici.

M. Legault, plus que des remerciements: cap vers une société égalitaire!

Ce texte est paru dans l’édition du 9 juin du journal Le Soleil 

Le gouvernement – représenté par une délégation de 14 hommes et quatre femmes – est à dessiner la relance économique. Bien qu’un certain retour à la normale soit souhaité, espérons que nous tirerons des leçons de cette crise.

Bien des belles promesses, d’éloquents remerciements et de beaux discours ont été prononcés par nos leaders et dirigeants. Des applaudissements même! Pourtant, si on mesure la valeur d’une société au traitement qu’elle réserve à ses plus démuniEs, reconnaissons d’emblée que la crise a mis en lumière les failles du système et les changements urgents qui s’imposent.

Intervenantes, professeures, infirmières, préposées, caissières, coiffeuses, mamans, proches aidantes, etc. – mais aussi principales victimes de la pandémie, surreprésentées à l’aide sociale, dans les emplois à temps partiel, en termes de statuts d’immigration précaires, etc. : le travail réalisé par les «anges gardiennes» est incommensurable. Et souvent invisible, autant que dévalorisé. S’il a été mis en lumière ces derniers mois, c’est généralement encore sans le nommer clairement. Par souci d’inclusion sûrement, on a donc surtout évoqué les «anges gardiens».

Il est maintenant temps d’en tirer d’importantes leçons pour passer à autre chose. Voici quelques propositions, loin d’être exhaustives.

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